Abus de rêve à
l'hypermarché
Parfois tu rêves…
Boire un simple thé
Avec un regard calme
Entre les rayons
Des speedés du samedi
Et le packaging
D'Eléphant parfum menthe
Humé par un de tes sens
Oublié… à travers le
plastique
Construit des buildings en toi
Diffuse sa pureté, « Je
t'aime, Darjeeling »
Et ton corps - devinez -
Pousse ta tête
Entre le 300ème et le
301ème étage
Saturday's midday Boddhisattva…
Les travées du désir
assassin
Barrées de chariots dingues
Évitent ton mental précieux
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Parfois tu rêves à
Auchan…
Souvent c'est quand t'as fourré
Une de tes collègues
Pour son pot d'anniversaire
Le vendredi
C'est l'amour des miracles !
Y'en a qu'ont pas de bol
Mais quand ta femme, là
Te bouscule carrément…
Excitée ! C'est le scoop !
Celui du samedi
Adieu tisane menthol
Rêve, Amour et « Je t'aime,
Darjeeling ! »
Pour quatre boutanches de rouge
On t'offre du rab : deux !
Qu'elle te dit
T'as la loupiote facile
La vie reprend tes droits
- Prends en huit, poupoule, c'est
d'l'A.O.C. !
- Ouais, ça nous en f'ra douze !
- Paye avec la carte d'avec laquelle qu'on
paye pas hein !
On sait compter fissa comme un boulier
Aux lumières de la vie
rêvée
Ludovic Kaspar (septembre 2007)
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Poisse
15 jours de coup de poisse oui. Et dire
qu'il a fallu que j'enfile mes guêtres pour la
première fois aujourd'hui dans ce magasin… Ca sent
plutôt pas mal les bonnes graines là dedans, les
graines servies aux animaux. Comme des croquettes comme des
boulettes comme tout ce que les êtres humains gobent.
J'aurais peut-être dû me
débarrasser autrement du corps, le convertir en
gâteaux apéritifs. Mais je n'ai pas les moyens. Et
personne ne sait comment se tournent les pulsions…
15 jours coup de pute oui. Cette dame bien
élevée en apparence, Milena, ma voisine, si
distante, avec qui j'ai grimpé d'un étage vers le
septième, est restée très ambiguë
durant notre approche. Je me souviens en montant
derrière elle… ses jambes en bas étaient
plus fines que l'escalier dont les marches laissaient voir des
jours, laissaient voir des trous. Pourquoi vivait-elle dans
cette barre de gare ? Pendant le coït j'ai eu l'impression
qu'il y avait comme un vide en elle, que ce vide dispersait un
rire et que par son rouge à lèvres pétant
la vie se débinait comme d'une outre percée qui
n'aurait jamais la forme d'un cœur bien portant.
15 jours plus tard je me suis levé
en pleine nuit avec ma tête comme un comprimé dans
ce pyjama déjà blanc. Je devais continuer
à mettre du noir dans tout ça. Et maintenant je
suis là entre les poules à pousser un caddie de
terreau humide.
J'ai peur oui j'ai peur qu'au fond de mon
jardin ouvrier ses dents brillent encore. Voilà que les
scientifiques retrouvent les mâchoires des
australopithèques….
Patrice Maltaverne
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Matthieu et Georges sont sur un carton
Episode 1 - Matthieu veut faire un tour
- On va faire un tour ?
- On y est déjà !
- Où ?
- A Tours !
- Non, je voulais dire ailleurs,
loin…
- Hors de Tours ?
- Oui ! Pourquoi ? Ca te fait peur ?
- J'en sais rien. Un peu.
- C'est parce que t'es jamais sorti de ton
trou.
- Je suis jamais sorti de Tours pour
être précis.
- C'est la même chose !
- Ah non ! Tours n'est pas un trou, et
vice versa.
- Peu importe. Londres ça te tente
?
- Chez les english ?
- Yes, of course !
- Bof… Pourquoi Londres ?
- Pourquoi pas !? C'est cette affiche qui
m'a donné l'idée.
- Hein ? En avion en plus !? T'es dingue,
c'est trop risqué.
- Tu préfères le train sous
la Manche ?
- Eh, j'ai ma dignité camarade ! Je
ne fais pas la manche, je ne tends jamais la main, ni pour
manger, ni pour un foutu billet de train !
- T'énerve pas. Je parlais de
l'autre Manche, la mer ; celle qui sépare la France de
l'Angleterre.
- Et ton train il passe là dessous
? Dis voir ce serait pas plutôt un sous-marin ?
- Mais non bougre d'andouille, il passe
dans un tunnel.
- Ouh là, ça m'inspire pas
confiance ton truc !
- Dommage…
- Et pis t'as vu le prix du billet d'avion
?
- Mouais. C'est un frein certain à
notre projet. Tu ferais quoi toi si t'avais cinquante-neuf
€uros ?
- Je préfère pas y penser,
je pourrais me mettre à rêver !
- Finalement c'est toi qu'a raison mon
Georges. Bon, fais voir, t'as combien là ?
- Deux €uros. On s'offre un coup de
rouge ?
- Non, attends… J'ai une meilleure
idée !
- Tu me fais peur avec tes idées
Matthieu
- Tu me fais peur avec tes idées
Matthieu
- De toute façon tu as tout le
temps peur !
- Faux !
- Alors cite moi un truc qui ne t'angoisse
pas.
- … chais pas. Faut que je
réfléchisse.
- En attendant lève tes fesses et
suis moi !
- On va où ?
- Tu verras !
- Tu m'inquiètes avec ces
cachotteries…
- Etonnant !
- Quoi ?
- Rien, laisse tomber.
- Pourquoi tu me dis rien ? Tu sais que
j'ai horreur des surprises !
- Et si je te dis Royal Cheese ?
- T'es encore en train de parler english !
- Ca te pose un problème ?
- Non. Mais j'aime pas le fromage.
- Décidément t'es chiant
Georges !
- Eh, mais, on est où ? Tu vas
quand même pas essayer de me traîner au Mac Do !?
- Et après ? Quand on est dans le
besoin on chipote pas.
- Je chipote pas : j'ai mes principes. Le
Mac Do, j'y foutrai pas un pied.
- Arrête de faire l'enfant. On se
partage un Royal Cheese et ce soir je t'offre un canon de rouge
avec ma monnaie personnelle. Deal ?
- Pas question !
- Comment ça ?
- Ces deux €uros sont ma
propriété. Et, moi vivant, il est hors de
question qu'ils finissent dans les caisses d'un foutu Mac Do.
- Très bien Georges, dans ce cas je
vais devoir te tuer.
- Tu ne me fais absolument pas peur
camarade !
- Tiens, ça change !
- Quoi ?
- Rien, laisse tomber.
- Bon…
- Bon… T'as une meilleure
idée alors ?
Marlène Tissot (septembre 2007)
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Sur la carte de géographie
Le ciel ne reconnaît plus ses petits
Il y pleut des boulets de suie
De la bouillie pour les sirènes
En appuyant sur un bouton
Voici qu'apparaît le
Parthénon
En trois dimensions
Oui, Messieurs
Les images vous sautent aux yeux
Elles s'évadent des écrans
Prennent la clef des champs
Pour retrouver les coquelicots
Les bleuets et les engrais chimiques
Plus pratiques
Ah ! La beauté du monde
Les prospectus pour Lilliput
Et la publicité immonde
Passeport pour les étoiles
Araignées
télématiques
La magie mécanique
Fait des dollars
Fait des dollars
Avec cent ans de retard
Rebecca Behar (septembre 2007)
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Y'a des cadeaux très surprenants
Des packs en promo premier âge
Et des trucs à moins vingt pour
cent
Des bons de réduc' à la
pelle
Pour un bambin à contenter
Ce sourire en produit d'appel
C'est le sien qu'on vient acheter
Du bonheur de
la bienveillance
L'enfance est
sanctifiée
Ça sent
le talc et l'innocence
Tout autour de
bébé
C'est merveilleux c'est émouvant
Rosi le poupon attendri
Et crie ses besoins si souvent
Qu'on peut en tirer son profit
Regardez sa jolie frimousse
Tout le portrait de ses parents :
Des désirs et la vie qui pousse
A dépenser cent fois par an
Y'a de l'amour
de la tendresse
Et quelques
intérêts
Dans
l'écrin d'attention qu'on dresse
Tout autour de
bébé
L'argument choc du dévouement
Et l'amour converti en sommes
Marketing et bons sentiments
Le nourrisson nourrit son homme
D'argumentaires en stratégies
Et du plus fiable au plus offrant
Quand le plan d'attaque est précis
Quoi de plus précieux qu'un enfant
?
Coûts
réduits pour respect des marges
Et charges
à alléger
On pratique un
curieux sevrage
Tout autour de
bébé
Les lits les landaus les layettes
Et les joujoux plus qu'il n'en faut
Tout se vend bien sauf les poussettes
Pendant le mois du siège auto
Bavoirs tétines et barboteuses
Les habits tout neufs à changer
Vont plomber sec et sans berceuse
Bas de laine et petits budgets
C'est que la
valeur n'attend pas
Le nombre des
années
Et c'est
encore plus vrai qu'on croit
Tout autour de
bébé
Dans le sac à dos du roi mage
Y'a des cadeaux très surprenants
Des packs en promo premier âge
Et des trucs à moins vingt pour
cent
Jour de naissance est jour de fête
Sonnez trompettes tonnez slogans
Sortez graphiques et calculettes
Il est né le divin enfant
Y'a comme un
parfum de butin
Sur les tables
à langer
Et une odeur
de magasin
Tout autour de
bébé
Et une odeur
de magasin
Tout autour de
bébé…
Cyril C. Sarot (septembre 2007)
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